Déplacement à pied ou en randonnées dans la jungle Amazonienne
Étude de l’itinéraire
Il est important, lorsque l’on va partir à pied en forêt, d’étudier avec attention la topographie de la région afin de pouvoir retrouver son point de départ en cas de perte.
Exemple : la rivière qui vous a amené coule Sud-Nord, vous allez remonter un de ses affluents à pied plein Ouest, vous en déduisez qu’en cas de perte, marcher à l’Est vous ramènera sur le cours d’eau principal. Sous la voûte du feuillage, il est impossible de voir à plus de quelques dizaines de mètres. Dans ces conditions, la progression se fait généralement en suivant un cours d’eau ou plus rarement à la boussole. Il ne faut pas perdre de vue que la forêt est un univers où la survie est difficile et que la vie se concentre près de l’eau. Je vous rappelle que les cartes sont à des échelles qui ne conviennent pas à la randonnée pédestre lorsqu’elles existent, elles sont souvent imprécises et inexactes et en l’absence d’une vue dégagée sur l’horizon et le relief avoisinant, il est à peu près impossible de se situer avec précision.
Évaluer les distances parcourues est très difficile, seul un topofil (boîtier équipé d’une bobine de fil, qui en se dévidant comptabilise sur un compteur la distance parcourue) permet de faire un point précis, à condition de noter les changements de direction, les pentes et ensuite de reporter tout ceci accompagnés de savants calculs sur la carte. Cela ressort plus du travail de géographe, que de la balade de découverte !
Le plus grand danger que vous couriez étant de vous perdre, de mourir de faim et d’épuisement, il est important de pouvoir retrouver son point de départ.
Alors, n’oubliez pas la boussole et surtout tracez un layon pour éviter de vous perdre.
Créer un layon/marquage
Le layonnage est l’action de créer une piste en se frayant un passage dans la végétation à la machette et de la matérialiser par un marquage.
Le layon
Lors des sorties en forêt, il peut paraître long et fastidieux de créer sa piste et de la marquer, mais c’est la seule manière de ne pas s’égarer. Il suffit de s’éloigner de quelques mètres de celle-ci pour la perdre et ainsi mettre sa vie en danger. Tous les ans des chasseurs expérimentés se perdent sur des itinéraires qu’ils croyaient connaître parfaitement et certains disparaissent à jamais.
En forêt, nous progressons en aveugle en ne découvrant la présence d’obstacles que lorsque l’on bute dessus et, en l’absence d’itinéraire existant, nous rallierons toujours notre objectif en ligne droite.
Les obstacles seront contournés après avoir noté les caps successifs et les distances parcourues. Le relevé du tracé et le suivi du cap devront être précis pour de ne pas manquer l’objectif.
Afin de progresser d’une manière rectiligne, en visant à l’aide de la boussole, il est aisé de prendre des repères dans la végétation et d’avancer ainsi par sauts de puce de repère en repère. Se frayer un chemin dans la végétation est d’autant plus aisé que l’on est nombreux. Le premier ouvre la piste, guidé par « l’homme boussole » qui en permanence le remet sur le droit chemin, si j’ose dire, les suivants marquent la piste et agrandissent le tracé.
Un exemple de distribution des tâches : le premier ouvre la piste dirigé par le second, le troisième agrandit le tracé, le quatrième s’occupe du marquage.
Ouvrir un layon est une opération longue et faire plus de 8 km/jour dans ces conditions ressort du prodige. Compter un bon 0,5 km/h quand tout va bien.
Le marquage
Toute piste ancienne ou nouvelle doit être marquée afin d’être identifiée au retour sans risques d’erreurs. Le procédé utilisé est simple, il suffit de faire sauter d’un coup de machette, une bande d’écorce de 20 cm de longueur à hauteur des yeux. La marque devant impérativement être visible dans les deux sens, elle doit vous permettre de revenir en arrière et à un suiveur éventuel (secours) de vous retrouver. D’une marque on doit pouvoir apercevoir l’autre et cela dans les deux sens.
Suivi d’un ancien layon
Certaines berges de rivières, fréquentées par des chasseurs, des prospecteurs de toute nature, peuvent regorger d’anciens layons qui s’entrecoupent continuellement, rendant leurs suivis problématiques. Souvent les chasseurs indigènes ne prennent pas la peine d’ouvrir un layon mais font une trace en cassant des branchettes selon une méthodologie précise leur permettant de retrouver leur chemin. Certaines pistes importantes utilisées par les orpailleurs peuvent être retrouvées et suivies, mais la nature gomme très vite les traces humaines. Au bout de 6 mois un layon est effacé et une piste non fréquentée l’est en moins de 10 ans.
Le suivi d’un ancien layon est une opération difficile où les risques de se perdre sont élevés. Il faudra impérativement marquer son chemin et prendre plus de précautions que pour une ouverture de piste.
Suivi d’un cours d’eau
Pour suivre une crique, deux manières de procéder s’affrontent :
- Sur la berge, le terrain peut être marécageux, impénétrable et de nombreux bras morts peuvent vous éloigner du lit principal. Les zigzags, les boucles que font sans cesse certaines rivières désorientent très vite le broussard le plus aguerri. La proximité de la crique apporte une fausse sécurité qui peut inciter à oublier de marquer. Il suffit de contourner un obstacle pour perdre de vue la crique et se perdre. Suivre une crique demande donc la même rigueur de marquage qu’une ouverture de piste.
- Dans le lit de la crique, les problèmes d’orientations sont résolus, mais l’avance est perturbée par les bois tombés qu’il faut enjamber, par les trous d’eau, les roches glissantes, sans oublier les précautions anti-raies qui ralentissent la marche.
Source : Abécédaire de la vie en forêt vierge, Christian Voillemont